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'J.LACAN'                         gaogoa

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IX-L'IDENTIFICATION

            Version rue CB                                    [#note note]

S�minaire du 24 janvier 1962

                    (->p182) (IX/1)  L'important pour ce qui nous concerne pour la suite de notre s�minaire, c'est que ce que j'ai dit hier soir concerne �videmment la fonction de l'objet, du petit a dans l'identification du sujet, c'est-�-dire quelque chose qui n'est pas imm�diatement � la port�e de notre main, qui ne va pas �tre r�solu tout de suite, sur lequel hier soir j'ai donn�, si je puis dire, une indication anticip�e en me servant du [http://www.uqac.uquebec.ca/zone30/Classiques_des_sciences_sociales/livres/freud_sigmund/essais_psychanalyse_appliquee/06_theme_trois_coffrets/theme_trois_coffrets.html th�me des trois coffrets]. Cela �claire beaucoup, ce th�me des trois coffrets, mon enseignement, parce que si vous ouvrez ce qu'on appelle bizarrement "les Essais de Psychologie Appliqu�e" et que vous lisez l'article sur les trois coffrets vous vous apercevrez que vous restez un petit peu sur votre faim en fin de compte ; vous ne savez pas tr�s bien o� il veut en venir, notre p�re Freud. Je crois qu'avec ce que je vous ai dit hier soir qui identifie les trois coffrets � la demande, th�me auquel, je pense, vous �tes d�s longtemps rompus qui dit que dans chacun des trois coffrets - sans cela il n'y aurait pas de devinette, il n'y aurait pas de probl�me - il y a le petit a, l'objet qui est en tant qu'il nous int�resse, nous analystes, mais pas du tout forc�ment -l'objet qui correspond � la demande. Pas du tout forc�ment non plus le contraire, parce que sans cela il n'y aurait pas de difficult�s. Cet objet, c'est l'objet du d�sir, et le d�sir o� est-il ? I1 est au dehors ; et l� o� il est vraiment, le point d�cisif, c'est vous, 1'analyste, pour autant que votre d�sir ne doit pas se tromper sur l'objet, du d�sir (->p183) (IX/2) du sujet. Si les choses n'�taient pas comme cela, il n'y aurait pas de m�rite � �tre analyste.

            Il y a une chose que je vous dis en passant, c'est que j'ai quand m�me mis l'accent devant un auditoire suppos� non savoir sur quelque chose dans lequel je n'ai peut-�tre pas mis ici assez mes lourds et gros sabots, c'est-�-dire que le syst�me de l'inconscient, le syst�me psy, est un syst�me partiel. Une fois de plus, j'ai r�pudi�, avec �videmment plus d'�nergie que de motifs, vu que je devais aller vite, la r�f�rence et la totalit�, ce qui n'exclut pas qu'on parle partiel. J'ai insist� dans ce syst�me sur son caract�re extra-plat, sur  son caract�re de surface sur lequel Freud insiste � tour bras tout le temps. On ne peut qu'�tre �tonn� que cela ait engendr� la m�taphore de la psychologie des profondeurs. C'est tout � fait par hasard que tout � l'heure avant de venir je retrouvai une note que j'avais prise du "Moi et du Ca" le moi est avant tout une entit� corporelle, non seulement une entit� toute en surface, mais une entit� correspondant � la projection d'une  surface ". C'est un rien : quand on lit Freud, on le lit toujours d'une certaine fa�on que j'appellerai la fa�on sourde.

        Reprenons maintenant notre b�ton de p�r�grin, reprenons o� nous en sommes o� je vous ai laiss�s la derni�re fois, � savoir sur l'id�e que la n�gation, si elle est bien quelque part au coeur de notre probl�me qui est celui de sujet, c'est pas d�j� tout de suite, rien qu'� la prendre dan sa ph�nom�nologie, la chose la plus simple � manier . Elle est en bien des endroits, et puis il arrive tout le temps qu'elle glis-(->p184) (IX/3)se   entre les doigts. Vous en avez vu un exemple la derni�re fois, pendant un instant � propos du "non nullus non mendax", vous m'avez vu mettre ce non, le retirer et le remettre ; cela se voit tous les jours. On m'a signal� dans l'intervalle que dans les discours de celui que quelqu'un dans un billet, mon pauvre cher ami Merleau-Ponty, appelait le Grand homme qui nous gouverne, dans un discours que ledit grand homme a prononc� on entend "on ne peut pas ne pas croire que les choses se passeront sans mal". L�-dessus ex�g�se : qu'est-ce qu'il veut dire ? L'int�ressant, c'est pas tellement ce qu'il veut dire, c'est que manifestement nous entendons tr�s bien justement ce qu'il veut dire et que si nous l'analysions logiquement nous voyons qu'il dit le contraire.

         C'est une tr�s jolie formule dans laquelle on glisse sans cesse pour dire � quelqu'un "vous n'�tes pas sans ignorer". Ce n'est pas vous qui avez tort, c'est le rapport du sujet au signifiant qui de temps en temps �merge. Ce n'est pas simplement des menus paradoxes, des lapsus que j'�pingle l� au passage. Nous les retrouverons, ces formules, au bon d�tour. Et je pense vous donner la clef de ce pourquoi "vous n'�tes pas sans ignorer" veut dire que ce que vous voulez dire. Pour que vous vous y reconnaissiez, je peux vous dire que c'est bien � le sonder que nous trouverons le juste poids, la juste inclinaison de cette balance o� je place devant vous le rapport du n�vros� � l'objet phallique quand je vous dis pour l'attraper ce rapport, il faut dire : "il n'est pas sans l'avoir". Cela ne veut �videmment pas dire qu'il l'a. S'il l'avait, il n'y aurait pas de question.

(->p185) (IX/4) Pour en arriver l�, repartons d'un petit rappel de la ph�nom�nologie de notre n�vros� concernant le point o�  nous en sommes : son rapport au signifiant. Depuis quelquefois je commence � vous faire saisir ce qu'il y a d'�criture dans l'affaire au signifiant, d'�criture originelle. Il a bien d� quand m�me vous venir � l'esprit que c'est essentiellement � cela que l'obs�d� a affaire tout le temps : ungeschehen machon, faire que �a soit non advenu . Qu'est-ce que cela veut dire, qu'est-ce que cela concerne ?

    Manifestement �a se voit dans son comportement : ce qu'il veut �teindre c'est ce que l' annaliste �crit tout au long de son histoire, l'annaliste - avec deux n - qu'il a en lui.
C'est les annales de l'affaire qu'il voudrait bien inventer. gratter, �teindre. Par quel biais nous atteint ce discours de Lady Macbeth quand elle dit que toute l'eau de la mer n'effacerait pas cette petite tache si ce n'est point par quelque �cho qui nous guide au coeur de notre sujet. Seulement voil�, en effa�ant le signifiant, comme il est clair que c'est de cela qu'il s'agit - � sa fa�on de faire, � sa fa�on d'effacer, � sa fa�on de gratter ce qui est inscrit, ce qui est beaucoup moins clair pour nous parce que nous en savons un petit bout de plus que les autres, c'est ce qu'il veut obtenir par l�. C'est en  cela qu'il est instructif de continuer sur cette route o� nous sommes, o� je vous m�ne en ce qui concerne comment �a vient un signifiant comme tel. Si �a a un tel rapport avec le fondement du sujet, s'il n'y a pas d'autre sujet pensable que ce quelque chose x de naturel en tant qu'il est marqu� du signifiant, il doit tout de m�me bien y avoir � �a un ressort.

        (->p186) (IX/5) Nous n'allons pas nous contenter de cette sorte de v�rit� aux yeux band�s. Le sujet, il est bien clair qu'il faut que nous le trouvions � l'origine du signifiant lui-m�me ; "pour sortir un lapin d'un chapeau", c'est comme cela que j'ai commenc� � semer le scandale dans mes propos proprement analytiques : le pauvre cher homme d�funt, et bien touchant en sa fragilit�, �tait litt�ralement exasp�r� par ce rappel que je faisais avec beaucoup d'insistance parce qu'� ce moment c'est des formules utiles que "pour faire sortir un lapin d'un chapeau il fallait l'y avoir pr�alablement mis".

        I1 doit en �tre de m�me concernant le signifiant, et c'est ce qui justifie cette d�finition du signifiant que je vous donne, cette distinction d'avec le signe : c'est que si le signe repr�sente quelque chose pour quelqu'un, le signifiant est autrement articul�, il repr�sente le sujet pour un autre signifiant . Ceci, vous le verrez assez confirm� � tous les pas pour que vous n'en quittiez pas la rampe solide. Et, s'il repr�sente ainsi le sujet, c'est comment ?

        Revenons � notre point de d�part, � notre signe, au point �lectif o� nous pouvons le saisir comme repr�sentant  quelque chose pour quelqu'un dans la trace. Repartons de la trace pour suivre notre petite affaire � la trace.

        Un pas, une trace, le pas de Vendredi dans l'�le de Robinson : �motion, le coeur battant devant cette trace. Tout ceci ne nous apprend rien, m�me si de ce coeur battant devant cette trace il r�sulte tout un pi�tinement autour de la trace ; cela peut arriver � n'importe quel croi-(->p187) (IX/6)sement de traces animales, mais si survenant je trouve la trace de ceci qu'on s'est efforc� d'effacer la trace, ou si m�me je n'en trouve plus trace, de cet effort, si je suis revenu parce que je sais - je n'en suis pas plus fier pour �a - que j'ai laiss� la trace, que je trouve que, sans aucun corr�latif qui permette de rattacher cet effacement � un effacement g�n�ral des traits de la configuration, on a bel et bien effac� la trace comme telle, l� je suis s�r que j'ai affaire � un sujet r�el. Observez que, dans cette disparition de la trace, ce que le sujet cherche � faire dispara�tre c'est son passage, de sujet, � lui. La disparition est redoubl�e de la disparition vis�e qui est celle de l'acte lui-m�me de faire dispara�tre.

        Ceci n'est pas un mauvais trait pour que nous y reconnaissions le passage du sujet quand il s'agit de son rapport au signifiant, dans la mesure o� vous savez d�j� que tout ce que je vous enseigne de la structure du sujet, tel que nous essayons de l'articuler � partir de ce rapport au signifiant, converge vers l'�mergence de ces moments de fading proprement li�s � ce battement en �clipse de ce qui n'appara�t que pour dispara�tre et repara�t pour de nouveau dispara�tre, ce qui est la marque du sujet comme tel.

        Ceci dit, si la trace est effac�e, le sujet en entoure la place d'un cerne quelque chose qui d�s lors le concerne, lui ; le rep�re de l'endroit o� il a trouv� la trace, eh bien, vous avez l� la naissance du signifiant. Ceci implique tout ce processus comportant le retour du dernier temps sur le premier, qu'il ne saurait y avoir d'articulation d'un signifiant sans ces trois temps. Une fois le signifiant constitu�, il y en (->p188) (IX/7) a forc�ment deux autres avant. Un signifiant, c'est une marque, une trace, une �criture, mais on ne peut pas le lire seul. Deux signifiants c'est un pataqu�s, un coq � l'�ne. Trois signifiants, c'est le retour de ce dont il s'agit, c'est-�-dire du premier. C'est quand le pas marqu� dans la trace est transform� dans la vocalise de qui le lit en "pas" que ce pas, � condition qu'on oublie qu'il veut dire le pas, peut servir d'abord dans ce qu'on appelle le phon�tisme de l'�criture, � repr�senter "pas", et du m�me coup � transformer la trace de pas �ventuellement en le pas de trace.

                Je pence que vous entendez au passage la m�me ambigu�t� dont je me suis servi quand je vous ai parl�, � propos du mot d'esprit, du pas de sens, jouant sur l'ambigu�t� du mot sens avec ce saut, ce franchissement qui nous prend l� o� na�t la rigolade quand nous ne savons pas pourquoi un mot nous fait rire, cette transformation subtile, cette pierre rejet�e qui d'�tre reprise devient la pierre d'angle, et je ferai volontiers le jeu de mots avec le Pi.jpg R de la formule du cercle parce qu' aussi bien c'est en elle - je vous l'ai annonc� l'autre jour en introduisant la -1   - que nous verrons que se mesure, si je puis dire, l'angle vectoriel du sujet par rapport au fil de la cha�ne signifiant.

        C'est l� que nous sommes suspendus et c'est l� que nous devons un peu nous habituer � nous d�placer, sur une substitution par o� ce qui a un sens se transforme en �quivoque et retrouve son sens. Cette articulation sans cesse tournante du jeu du langage, c'est dans ses syncopes m�me que nous avons � (->p189) (IX/8) rep�rer dans ses diverses fonctions le sujet. Mes illustrations ne sont jamais mauvaises pour adapter un oeil mental o� l'imaginaire joue un grand r�le. C'est pour �a que, m�me si c'est un d�tour, je ne trouve pas mauvais de vous rapidement tracer une petite remarque simplement parce que je la trouve � ce niveau dans mes notes. 

        Je vous ai parl� � plus d'une reprise, � propos du signifiant, du caract�re chinois, et je tiens beaucoup � d�senvo�ter pour vous l'id�e que son origine est une figure imitative. Il y en a un exemple que je n'ai pris que parce que c'est lui qui me servait le mieux, j'ai pris le premier de celui qui est articul� dans ces exemples, ces formes archa�ques dans l'ouvrage de Karlgren qui s'appelle "Grammata serica", ce qui veut dire exactement " les signifiants chinois"

         Le premier dont il se sert sous la forme moderne est celui-ci Kho.jpg  , c'est le caract�re Kho qui veut dire  pouvoir. Dans le Tch'ouen qui est un ouvrage d'�rudits, � la fois pr�cieux pour nous pour son caract�re relativement ancien, mais qui est d�j� tr�s �rudit, c'est-�-dire tr�s arm� d'interp�tations sur lesquelles nous pouvons avoir � reprendre. Il semble que ce ne soit pas sans raison que nous puissions nous fier � la racine qu'en donne le commentateur et qui est bien jolie, c'est � savoir qu'il s'agit d'une sch�matisation du

Name.jpg
heurt de la colonne d'air qu'elle vient � pousser dans l'occlusive gutturale contre l'obstacle que


lui oppose l'arri�re de la langue contre le palais. Ceci est d'autant plus s�duisant que, si vous ouvrez un ouvrage de pho-(->p190) (IX/9)n�tique, vous trouverez une image qui est � peu pr�s celle-l� pour vous traduire le fonctionnement de l'occlusive : Name.jpg

          Et avouez que ce n'est pas mal que ce soit �a qui soit choisi pour figurer le mot pour voir la possibilit�, la fonction axiale introduit dans le monde par l'av�nement du sujet au beau milieu du r�el. L'ambigu�t� est totale. Car un tr�s grand nombre de mots s'articulent kho en chinois, dans lesquels ceci nous servira de phon�tique, � ceci pr�s que les compl�tes comme pr�sentifiant le sujet � l'armature signifiante, et ceci, sans ambigu�t� et dans tous les caract�res, est la repr�sentation de la bouche :

File:190.jpg

                Mettez ce signe au-dessus, c'est le signe K� qui veut dire grand. Il a manifestement quelque rapport avec la petite forme humaine, en g�n�ral d�pourvue de bras. Ici, comme c'est d'un grand qu'il s'agit, il a des bras. Ceci n'a rien � faire avec ce qui se passe quand vous avez ajout� ce signe ta au signifiant pr�c�dent. Cela se lit d�sormais i, mais ceci conserve la trace d'une prononciation ancienne dont nous avons des attestations gr�ce � l'usage de ce terme � la rime dans les anciennes po�sies, nomm�ment celles du Che King qui est un des exemples les plus fabuleux des m�saventures litt�raires puisqu'il a eu le sort de devenir le support de toutes sortes d' �lucubrations moralisantes, d'�tre la base de tout un enseignement tr�s tortill� des mandarins sur les devoirs du sou-(->p191) (IX/10)verain, du peuple et du tutti quanti, alors qu'il s'agit manifestement de chansons d'amour d'origine paysanne. Un peu de pratique de la litt�rature chinoise - je ne cherche pas � vous faire croire que j'en ai une grande, je ne me prend pas pour               (espace vide) (note du claviste)' qui, lorsqu'il fait allusion � son exp�rience de la Chine, il s'agit d'un paragraphe que vous pouvez retrouver dans les livres � la port�e de tous du p�re Wieger.

          Quoi qu'il en soit, d'autres que moi ont �clair� ce chemin, nomm�ment Marcel Granet, dont apr�s tout vous ne perdriez rien � ouvrir le beau livre sur les danses et l�gendes et sur les f�tes anciennes de la Chine. Avec un peu d'efforts vous pourrez vous familiariser avec cette dimension vraiment fabuleuse qui appara�t de ce qu'on peut faire avec quelque chose qui repose sur les formes les plus �l�mentaires de l'articulation signifiante. Par chance, dans cette langue, les mots sont monosyllabiques : ils sont superbes, invariables, cubiques, vous ne pouvez pas vous y tromper. Ils s'identifient au signifiant, c'est le cas de le dire. Vous avez des groupes de quatre vers, chacun compos� de quatre syllabes, la situation est simple. Si vous les voyez et pensez que de �a on peut faire tout sortir m�me une doctrine m�taphysique qui n'a aucun rapport avec la signification originelle, cela commencera, pour ceux qui n'y seraient pas encore � vous ouvrir l'esprit. C'est pourtant comme cela : pendant des si�cles on a fait l'enseignement de la morale et de la politique sur des ritournelles qui signifient dans l'ensemble "je voudrais bien baiser avec toi", je n' exag�re rien, allez-y voir.

(->p192) (IX/11)

File:KHO2.jpg
     Ceci veut dire "i", qu'on commente  grand pouvoir, �norme. Cela n'a bien entendu absolument aucun rapport avec cette conjonction. "i" ne veut pas tellement plus dire grand pouvoir que ce petit mot pour lequel en fran�ais il n'y a pas vraiment quelque chose qui nous satisfasse :

je suis forc� de le traduire par l'impair au sens que le mot impair peut prendre de glissement, de faute, de faille, de chose qui ne va pas, qui bo�te, en anglais si gentiment illustr� par le mot "odd". Et comme je vous le disais tout � l'heure, c' est ce qui m'a lanc� sur le Che King. A cause du Che King, nous savons que c'�tait tr�s proche du kho, au moins en ceci : c'est qu'il y avait une gutturale dans la langue ancienne qui donne l' autre implantation de l'usage de ce signifiant pour d�signer le phon�me i.

Chaise.jpg
        Si vous ajoutez cela Le robinier du square René-Viviani, un des plus vieux arbres de Paris dans le Square René-Viviani - Montebello.jpg devant, qui est un d�terminatif, celui de l'arbre, et qui d�signe tout ce qui est "de bois", vous aurez une fois que les choses en sont l� un signe qui d�signe la chaise, cela se dit i, et ainsi de suite. Ca continue  comme cela, cela n'a pas de raison de s'arr�ter.  
Si vous mettez ici, � la place du signe de l'arbre, le signe du cheval, cela veut dire s'installer � califourchon.  

                        Ce petit d�tour, je le consid�re, a son utilit� pour vous faire voir que le rapport de la lettre au langage n'est pas quelque chose qui soit � consid�rer dans une ligne �vo-(->p193) (IX/12)lutive. On ne part pas d'une origine �paisse, sensible, pour d�gager de l� une forme abstraite. I1 n'y a rien qui ressemble � quoi que ce soit qui puisse �tre con�u comme parall�le au processus dit du concept m�me seulement de la g�n�ralisation. On a une suite d'alternances o� le signifiant revient battre l'eau, si je puis dire, du flux par les battoirs de son moulin, sa roue remontant � chaque fois quelque chose qui ruisselle, pour de nouveau retomber, s'enrichir, se compliquer, sans que  nous puissions jamais � aucun moment saisir ce qui domine du d�part concret ou de l'�quivoque.

            Voil� qui va vous mener au point o� aujourd'hui le pas que j'ai � vous faire faire, une grande part des illusions qui nous arr�tent net, des adh�rences imaginaires, dont peu importe que tout le monde y reste plus ou moins les pattes prises  comme des mouches, mais pas les analystes, c'est tr�s pr�cis�ment li� � ce que j'appellerai les illusions de la logique formelle. La logique formelle est une science fort utile, comme j'ai essay� la derni�re fois de vous en pointer l'id�e, � condition que vous vous aperceviez qu'elle vous pervertit en ceci que puisqu'elle est la logique formelle elle devrait vous interdire � tout instant de lui donner le moindre sens. C'est bien entendu ce � quoi avec le temps on en est venu. Mais les grands s�rieux, les braves, les honn�tes de la logique symbolique connus depuis une cinquantaine d'ann�es, �a leur donne  je vous assure un sacr� mal parce que c'est pas facile de construire une logique telle qu'elle doit �tre si elle r�pond vraiment � son titre de logique formelle, en ne s'appuyant strictement que sur le signifiant, en s'interdisant tout rapport et (->p194) (IX/13) donc tout appui intuitif sur ce qui peut s'insurger du signifi� dans le cas o� nous faisons des fautes, en g�n�ral c'est l�-dessus qu'on se rep�re. Je raisonne mal parce que dans ce cas-l�, il en r�sulterait n'importe quoi : ma grand'm�re la t�te � l'envers. Qu'est-ce que cela peut nous faire ? Ce n'est pas en g�n�ral avec �a qu'on nous guide parce que nous sommes tr�s intuitifs ; si on fait de la logique formelle, on ne peut que l'�tre.

    

(espace vide) (le claviste)

             Or l'amusant est que le livre de base d'une logique symbolique, enserrant tous les besoins de la cr�ation math�matique, les Principia Mathematica de Bertrand Russell arrive tout pr�s de ce but : ils s'arr�tent consid�rant comme une contradiction qui mettrait en cause toute la logique math�matique, ce paradoxe dit de Bertrand Russell dont le biais frappe la valeur de la th�orie dite des ensembles. En  quoi se distingue un ensemble d'une d�finition de classe, la chose reste ambigu� puisque, ce que je vais vous dire et qui est admis par n'importe quel math�maticien, c'est � savoir que ce qui distingue un ensemble d'une classe, ce n'est rien d'autre que l'ensemble sera d�fini par des formules qu'on appelle axiomes, qui seront pos�es sur le tableau en des symboles r�duits � des lettres auxquelles s' adjoignent quelques signifiants suppl�mentaires indiquant des  relations.

(espace vide) (le claviste)

          Il n'y a absolument aucune autre signification de cette logique dite symbolique par rapport � la logique traditionnelle, sinon cette r�duction � des lettres, je vous garantis vous pouvez m'en croire, sans que j'aie plus � m'engager dans des exemples. Quelle est donc la vertu, forc�ment qui est bien quelque part, pour que ce soit en raison de cette seule diff�rence qu'ait pu �tre d�velopp� un monceau de cons�quences dont je vous assure que l'incidence dans le d�veloppement de quelque chose qu'on appelle les math�matiques n'est pas mince par rapport � l'appareil dont on a dispos� pendant des si�cles et dont le compliment qu'on lui a fait qu'il n'a pas boug� entre Aristote et Kant se retourne. C'est bien, si tout de m�me les choses ne se sont mis � cavaler comme elles l'ont fait - car Principe Mathematica fait deux tr�s gros volumes et ils n'ont qu'un int�r�t fort mince - mais enfin si le compliment se (->p196) (XI/15) retourne, c'est bien que l'appareil auparavant pour quelque raison que ce soit se trouvait singuli�rement stagnant.

        Alors, � partir de l�, comment les auteurs viennent-ils � s'�tonner de ce qu'on appelle le paradoxe de Russell ?

        Le paradoxe de Russell est celui-ci : on parle de l' ensemble de tous les ensembles qui ne se comprennent pas eux-m�mes. Il faut que j'�claire un peu cette histoire qui peut vous sembler au premier abord s�che. Je vous l'indique tout de suite. Si je vous y int�resse, du moins je l'esp�re, c'est avec cette vis�e qu'il y a le plus �troit rapport - et pas seulement homonymique, justement parce qu'il s'agit de signifiant et qu'il s'agit par cons�quent de ne pas comprendre - avec la position du sujet analytique, en tant que lui aussi, dans un autre sens du mot comprendre et si je vous dis de ne pas comprendre c'est pour que vous puissiez comprendre de toutes les fa�ons que lui aussi ne se comprend pas lui-m�me.

        Passer par l� n'est pas inutile, vous allez le voir, car nous allons sur cette route pouvoir critiquer la fonction de notre objet. Mais arr�tons-nous un instant sur ces ensembles qui ne se comprennent pas eux-m�mes. I1 faut �videmment pour concevoir ce dont il s'agit partir, puisque nous ne pouvons quand m�me pas dans 1a communication ne pas nous faire des concessions de r�f�rences intuitives, parce que les r�f�rences intuitives vous les avez d�j�. I1 faut donc les bousculer pour en mettre d'autres. Comme vous avez l'id�e qu'il y a une classe et qu'il y a une classe mammif�re, il faut tout de m�me (->p197) (IX/16) que j'essaie de vous indiquer qu'il faut se r�f�rer � autre chose. Quand on entre dans la cat�gorie des ensembles, il faut se r�f�rer au classement bibliographique cher � certains, classement compos� de d�cimales ou autres ; mais quand on a quelque chose d'�crit, il faut que �a se range quelque part, faut savoir comment automatiquement le retrouver. Alors, prenons un ensemble qui se comprend lui-m�me, prenons par exemple l'�tude des humanit�s dans un classement bibliographique. Il est clair qu'il faudra mettre � l'int�rieur les travaux des humanistes sur les humanit�s ; l'ensemble de l'�tude des humanit� doit comprendre tous les travaux concernant l'�tude des humanit�s en tant que tel.

         Mais consid�rant maintenant les ensembles qui ne se  comprennent pas eux-m�mes ; cela n'est pas moins concevable, c'est m�me le cas le plus ordinaire. Et puisque nous sommes th�oriciens des ensembles et qu'il y a d�j� une classe de l'ensemble  des ensembles qui se comprennent  eux-m�mes, il n'y a vraiment nulle objection � ce que nous fassions la classe oppos�e - j'emploie classe ici parce que c'est bien l� que l'ambigu�t� va r�sider - : la classe des ensembles qui ne se comprennent eux-m�mes, l'ensemble de tous les ensembles qui ne se comprennent pas eux-m�mes. Et c'est l� que les logiciens commences � se casser la t�te, � savoir qu'il se disent : cet ensemble  de tous les ensembles qui ne se comprennent pas eux-m�mes, est-ce qu'il se comprend lui-m�me ou est-ce qu'il ne se comprend pas ?

Dans un cas comme dans l'autre, il va choir dans la contradiction. Car si, comme selon l'apparence, il se comprend lui-m�me, (->p198) (IX/17) nous voici en contradiction avec le d�part qui nous disait qu'il agissait d'ensembles qui ne se comprennent pas eux-m�mes. 
D'autre part, s'il ne se comprend pas, comment l'excepter justement de ce que donne cette d�finition, � savoir qu'il ne se comprend pas lui-m�me?

          Cela peut vous sembler assez b�b�, mais le fait que �a frappe au point de les arr�ter, les logiciens qui ne sont pas pr�cis�ment des gens de nature � s'arr�ter � une vaine difficult�, et s'ils y sentent quelque chose qu'ils peuvent appeler une contradiction mettant en cause tout leur �difice, c'est bien parce qu'il y a quelque chose qui doit �tre r�solu et qui concerne, si vous voulez bien m'�couter, rien d'autre que ceci, qui concerne la seule chose que les logiciens en question n'ont pas exactement en vue, � savoir que la lettre dont ils se servent c'est quelque chose qui a en soi-m�me des pouvoirs, un ressort, auquel ils ne  semblent point tout � fait accoutum�s. Car si nous illustrons ceci en application de ce que nous avons dit qu'il ne s'agit de rien d'autre que de l'usage syst�matique d'une lettre, de r�duire, de r�server � la lettre sa fonction signifiante pour faire sur elle, et sur elle seulement, reposer tout l'�difice logique, nous arrivons � ce quelque chose de tr�s simple que c'est tout � fait et tout simplement, que cela revient � ce qui se passe quand nous chargeons la lettre a, par exemple, si nous nous mettons � sp�culer sur l'alphabet, de repr�senter comme lettre a toutes les autres lettres de l'alphabet.

De deux choses l'une : ou les autres lettres de l'alphabet, nous les �num�rerons de b � z, en quoi la lettre a  (->p199) (IX/18) les repr�sentera sans ambigu�t� sans pour autant se comprendre elle-m�me ; mais il est clair d'autre part que, repr�sentant ces lettres de l'alphabet en tant que lettre, elle vient tout naturellement je ne dirai m�me point enrichir, mais compl�ter � la place dont nous l'avons tir�e, exclue, la s�rie des lettres, et simplement en ceci que, si nous partons de que a -c'est l� notre point de d�part concernant l'identification - fonci�rement n'est point a, il n'y a l� aucune difficult� : la lettre a, � l'int�rieur de la parenth�se o� sont orient�es toutes  les lettres qu'elle vient symboliquement subsumer, n'est pas le m�me a et est en m�me temps le m�me.

             Il n'y a l� aucune esp�ce de difficult�, il ne devrait y en avoir d'autant moins que ceux qui en voient une sont justement ceux-l� qui ont invent� la notion d'ensemble pour faire face aux d�ficiences de la notion de classe et par cons�quent soup�onnent qu'il doit y avoir autre chose dans la fonction de l'ensemble que dans la fonction de la classe.

             Mais ceci nous int�resse, car qu'est-ce que cela veut dire ?

             Comme je vous 1'ai indiqu� hier soir, l'objet m�tonymique du d�sir, ce qui dans tous les objets repr�sente ce petit a �lectif, o� le sujet se perd, quand cet objet vient au jour m�taphorique, quand nous venons � le substituer au sujet qui, dans la demande est venu � se syncoper, � s'�vanouir, pas de trace : S, nous le r�v�lons, le signifiant de ce sujet, nous lui donnons son nom : le bon objet. Le sein de la m�re,  la mamme, voil� la m�taphore dans laquelle, disons-nous, sont pri-(->p200) (IX/19)ses toutes les identifications articul�es de la demande du sujet ; sa demande est orale, c'est le sein de la m�re qui les prend dans sa parenth�se c'est le A qui donne leur valeur � toutes ces unit�s qui vont s'additionner dans la cha�ne signifiante :          A (+I +I +I)

             La question que nous avons � poser, c'est �tablir la diff�rence qu'il y a de cet usage que nous faisons de la mamme avec la fonction qu'il prend par la d�finition, par exemple, de la classe mammif�re. Le mammif�re se reconna�t � ceci qu'il a des mammes. Il est entre nous assez �trange que nous soyons aussi peu renseign�s sur ce qu'on en fait effectivement dans chaque esp�ce. L'�thologie des mammif�res est encore rudement � la tra�ne puisque nous en sommes, sur ce sujet comme pour la logique formelle, � peu pr�s pas plus loin que le niveau d'Aristote (excellent l'ouvrage "l'Histoire des Animaux"). Mais nous, est-ce que c'est cela que veut pour nous dire le signifiant mamme pour autant qu'il est l'objet autour de quoi nous substantifions le sujet dans un certain type de relations dites pr�g�nitales ?

              I1 est bien clair que nous en faisons un tout autre usage, beaucoup plus proche de la manipulation de la lettre E dans notre paradoxe des ensembles, et pour vous le montrer, je vais vous faire voir ceci : A (+1+1+1) c'est que parmi ces un de la demande, dont nous avons r�v�l� la signifiance concr�te, est-ce qu'il y a ou non le sein lui-m�me ? En d'autres termes, quand nous parlons de fixation orale, le sein latent, l'actuel, celui apr�s lequel votre sujet fait ah, ah, ah, est-il mammaire ?

(->p201) (IX/20) I1 est bien �vident qu'il ne l'est pas parce que vos oraux qui adorent les seins, ils adorent les seins parce que ces seins sont un phallus. Et c'est m�me pour �a qu'il est possible que le sein soit aussi phallus, que M�lanie Klein le fait appara�tre tout de suite aussi vite comme le sein d�s le d�part, en nous disant qu'apr�s tout c'est un petit sein plus commode, plus portatif, plus gentil.

               Vous voyez bien que poser ces distinctions structurales peut-nous mener quelque part, dans la mesure o� le sein refoul� r��merge, ressort dans le sympt�me, au m�me simplement dans un coup que nous n'avons pas autrement qualifi� : la fonction sur l'�chelle perverse � produire de ce quelque chose d'autre qui est l'�vocation de l'objet phallus.

                La chose s'inscrit ainsi  File:Sein.jpg

 

                Qu'est-ce que l'a ? Mettons � sa place la petite balle de ping-pong, c'est-�-dire rien, n'importe quoi, n'importe quel support du jeu d'alternance du sujet dans le fort-da. L� vous voyez qu'il ne s'agit strictement de rien d'autre que du passage du phallus de a+ � a- et que par l� nous voyons dans le rapport d'identification, puisque nous savons que dans ce que le sujet assimile c'est lui dans sa frustration, nous savons que le rapport de  File:1-A.jpg, lui 1 en tant qu'assumant la signification de l'Autre comme tel, a le plus grand rapport avec la r�alisation de l'alternance.  

                                (a  X  -a)

(->p202) (IX/21) 

                Ce produit de a par -a, qui formellement fait un moins a au carr� : File:-a2.jpg nous serrerons pourquoi une n�gation est irr�ductible : quand il y a affirmation et n�gation, l'affirmation de la n�gation fait une n�gation, la n�gation de l' affirmation aussi - nous voyons l� pointer dans cette formule m�me du File:-a2.jpg , nous retrouvons la n�cessit� de la mise en jeu � la racine de ce produit du racine de - I,  File:R-1.jpg

                 Ce dont il s'agit, ce n'est pas simplement de la pr�sence ni de l'absence du petit a, mais de la conjonction des deux, de la coupure. C'est de la disjonction du a et du -a qu' il s'agit, et c'est l� que le sujet vient � se loger comme tel, que l'identification a � se faire avec ce quelque chose qui est l'objet du d�sir. C'est pour �a que le point o�, vous le verrez, je vous ai amen�s aujourd'hui, est une articulation qui vous servira dans la suite.

note: bien que relu, si vous d�couvrez des erreurs manifestes dans ce s�minaire, ou si vous souhaitez une pr�cision sur le texte, je vous remercie par avance de m'adresser un [mailto:gaogoa@free.fr �mail]. [#J.LACAN Haut de Page] 
[../../erreurs.htm commentaire]          relu et corrig� en ao�t 2002